SORTEZ! ou comment résister à une injonction préfectorale
Ce lundi 21 décembre 2009, au palais de justice de Tours, devaient comparaître les frères jumeaux Da Silva, devant le juge des libertés. Placés dans ce qui sert de centre de rétention à Tours, au sein même du commissariat, depuis vendredi dernier, ces deux jeunes Angolais de 20 ans avaient reçu une OQTF (Obligation de Quitter le Territoire Français) début 2009. Depuis, ils étaient à la merci du moindre contrôle d’identité. Le mère et le reste de leur fratrie sont en règle et vivent dans un foyer à Amboise. La famille Da Silva avait quitté l’Angola suite à l’assassinat politique du père. Seulement, l’OFPRA (Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides), fort de son expertise, leur a refusé deux fois de suite le statut de réfugié politique . |
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Description subjective de l’audience: Quelques membres de RESF37, de Soif d’Utopies (dont Muriel, mon invité du soir), de la LDH (Ligue des Droits de l’Homme) venus apporter leur soutient à Nelson et Adilson Da Silva, doivent vider leurs poches à l’entrée du Palais de Justice pour passer sous le portillon. Les journalistes (France 3, TV Tours et moi-même munie d’un enregistreur audio), quant à eux, doivent attendre la sentence: le procureur refuse de laisser entrer les caméras. « Vous pouvez filmer tout ce que vous voulez dans la rue, mais pas ici. » Le journaliste de France 3 ne comprend pas: « C’est la première fois qu’on m’interdit de filmer dans les couloirs. C’est nouveau. » L’affaire Da Silva et analyse de l’OFPRA: On attendra ensuite longtemps devant la porte du juge des Libertés. Qui attend? La fiancée et le bébé de Nelson. La belle maman, une amie. Des sympathisants militants. Des journalistes. Nelson finit par arriver. Il a entouré ses mains d’un keffieh pour cacher les menottes qui lui enserrent les poings. Quand son amie et sa fiancée l’aperçoivent, escorté par trois policiers armés, l’émotion explose. On l’a soustrait de leur vie, arbitrairement. L’avocate militante, Cécile Lison-Croze, n’a rencontré Nelson que quelques minutes avant la comparution devant le juge. De même pour son frère Adilson. On entre dans la salle d’audience. Le juge est petit, nerveux, il lit les procédures en mâchant ses mots. On comprend qu’il veut expédier l’affaire. Que plus vite ça ira, mieux il se portera. Il s’adresse à Nelson sans le regarder. Les yeux rivés sur sa feuille, le souffle rapide. Des fois, il lève la tête vers nous, son auditoire. La porte-parole de la préfecture. Manteau de fourrure, bouche tirée vers le bas, regard morne, annonce d’un air tout aussi détaché les raisons pour lesquelles, il va de soi, au regard de la loi, que Nelson n’a pas sa place en France, et qu’il doit retourner d’où il vient. Peu importe si toute sa famille est désormais en France, peu importe si son fils gazouille dans le couloir, peu importe s’il est inscrit au lycée professionnel, peu importe si sa vie est en danger en Angola. L’avocate essaie de pointer les vices de procédure mais l’issue du délibéré n’en sera pas moins acerbe: quinze jours en centre de rétention, le temps que l’Angola accepte de récupérer les deux frères, et, hop!, dans le charter. Notez la condescendance de la porte-parole de la préfecture: « Oh mais ne vous inquiétez pas, les frères ne seront pas séparés! J’avais déjà réserver deux lits dans le centre de rétention d’Orly. » Je suis sûre, Madâme, qu’ils vous en sont très reconnaissants. Collectif soif d’utopies
Vous pouvez contacter RESF37, Chrétiens migrants, ou Soif d’Utopies (soifdutopies@yahoo.fr). |
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